Inario

Le blog de Keyvan Nilforoushan

Archive for the month “December, 2004”

La Publicite sans public (suite)

Je reprends ici une intervention de Pierre Bellanger, PDG de Skyrock, citée sur le site de Richard Menneveux. Ces quelques lignes me semblent assez bien faire écho à la dernière note sur les difficultés de la télévision à conserver son audience parmi les 18-35 ans, en observant cette fois le phénomène sous l’angle de la radio :

[…] La nouvelle génération à laquelle nous nous adressons est la
première génération de la révolution Internet et de la téléphonie
mobile : 80% de nos auditeurs ont accès à Internet, et 90% ont un
téléphone mobile
. […]

La radio traditionnelle […] c’est un point d’émission qui agrège un nuage d’anonymes qu’on
appelle positivement l’audience
. Cette audience est très pratique car
elle ne fait qu’écouter. […].

Ce modèle est celui des mass media, c’est le modèle de la
diffusion. Nous pensons qu’Internet révolutionne cet âge de la
diffusion, car Internet n’est pas seulement un nouveau moyen de
diffuser des informations, de même que l’imprimerie n’est pas seulement
un nouveau moyen de recopier la bible
. [L]a force de l’Internet, c’est la conversation. Le 20e siècle a été
l’âge de la diffusion. Le 21e siècle est l’âge de la conversation. […]

Cette idée, et l’exemple sur internet et l’imprimerie, ne sont pas sans rappeler des thèmes chers à Marshall McLuhan… Mais ce sont des idées sur lesquelles Skyrock a su capitaliser :

En chiffres, cela donne : sur Internet, la famille de sites
Skyrock.com atteint par mois 700 millions de pages vues, 30 millions de
visites, 6 millions de visiteurs uniques, soit environ 500 à 600.000
visiteurs uniques par jour.

(la retranscription est de Cyril Fievet) 

La publicité sans public ?

Comment vendre son produit quand les vieilles recettes ne marchent plus ?

La télévision perd de plus en plus sa prédominance dans le spectre de l’entertainement : selon un article de Mai 2004 (Gamers Spurning TV, Movies), 52 % des joueurs de jeux vidéos affirment regarder la télévision moins souvent, 47 % aller moins souvent au cinéma, et 41% regarder moins de films à la maison (étude de l’Entertainment Software Association). L’industrie du jeu vidéo représente déjà, à elle seule, 10 milliards de dollars de chiffre d’affaires par an.

Pour une télévision qui raisonne en termes d’audience, et non de ventes, ce chiffre est d’autant plus signifiant que ce public perdu est en grande partie composé du segment particulièrement recherché des jeunes males de moins de 35 ans.

C’est ce public que Wired appelle The Lost Boys.  Selon Nielsen, entre 2002 et 2003, le temps passé par les jeunes males à regarder la télévision à diminué de 12%. Et le temps que cette audience passe devant la télé est souvent moins exclusif qu’avant, partagé avec Internet et d’autres occupations.

L’industrie de la télévision cherche à récupérer cette audience avec par exemple des émissions tournant autour des jeux vidéos … Mais ce n’est pas forcément suffisant. Dans un article de 1995 (déjà !), Wired reprenait une interview où Nick Donatiello remarquait que les nouveaux médias peuvent répondre à la diversité des demandes de l’audience d’une façon que la télévision ne pourra jamais égaler. A ce titre, il prédisait que les caractéristiques démographiques des téléspectateurs de la télévision broadcast allaient de plus en plus ressembler à celles des fumeurs : plus agés, moins éduqués, moins de pouvoir d’achat.

La preuve de la prise de conscience de ce phénomène ?  Peu de marques résument aussi bien que Coca-Cola la relation entre la télévision et les fabricants de Fast-Moving Consumer Goods. Pourtant, en 2003, la marque a diminué ses dépenses de publicité télévisuelle de 10%. Selon le président, Steven Heyer : "Vers où allons-nous ? Nous nous éloignons de la télévision comme média phare."

Cela implique le développement de formes de publicité alternatives : le marketing viral (que BzzAgents tente d’industrialiser),  la publicité centrée autour d’expériences (pour le lancement d’un nouvel appareil photo, Sony Ericsson avait embauché des acteurs pour demander à des passants de les prendre en photo – avec bien sur un téléphone !),… Un point commun en tout cas entre toutes ces formes de promotions : la qualité du produit, et de l’expérience, reprennent une véritable importance.

Tout cela me conduit à penser que nous nous éloignons, probablement pour de bon, de l’époque où un budget de pub TV conséquent suffisait pour différencier, imposer et défendre un produit. Pour le consommateur, est-ce vraiment un mal ?

En attendant la taille critique…

Seth Godin est un écrivain américain spécialiste du marketing, auteur notamment de Unleashing the Ideavirus, un livre électronique déjà téléchargé 1 000 000 de fois. Il donne sur son site une très bonne explication de ce qu’il appelle le problème de la falaise : les entreprises dont le business model dépend de l’adoption de leur produit par une quantité considérable d’utilisateurs – comme aujourd’hui Microsoft et eBay.

Nous recevons nous aussi beaucoup de dossiers d’entreprises qui dépendent de l’atteinte d’une telle taille critique, d’un seuil au-delà duquel les revenus vont exploser. Malheureusement — indépendamment des montants levés ou non auprès de capitaux-investisseurs — les entreprises qui parviennent à réussir avec ce type de modèle sont extrêmement rares. Pour citer l’article :

Your business has to work when it’s small in order to survive to the point where it gets big.

Et en effet, pour reprendre le même exemple que plus haut:  aujourd’hui, Microsoft arrive sans aucun doute à extraire une rente de situation grâce à sa capacité à définir les standards. Si sa rentabilité avait du attendre d’obtenir une telle part de marché, la société aurait-elle pu en arriver là ?

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